17,3 Pouces
Contes de Stéphane d'Arc

Prune et le pays des fées

Il existe dans le lointain nord une forêt dont tous les arbres sont recouverts de feuilles d'argent. Certains affirment que c'est en raison du sous-sol riche en minerais, et qu'un jour il faudra songer à défricher et creuser le sol ; mais les plus nombreux, dont les habitants qui vivent en bordure, savent que ces feuilles d'argent annoncent clairement aux hommes la frontière du pays des fées, lesquelles sont capricieuses et aiment ce qui brillent.
Chacun sait que la forêt est habitée, mais de quoi, nul ne le sait, personne n'y ayant jamais vu personne. Les anciens racontent des histoires horribles, mais cela n'a jamais empêché les enfants de se rendre le jour de leur septième anniversaire à l'intérieur de la forêt.
Il y avait déjà plusieurs semaines que Prune songeait à ce jour fameux. Elle aurait voulu y aller avec son frère, mais elle savait bien qu'il fallait y aller seule, et puis son frère était un garçon.
Le jour tant attendu arriva et sa mère brossa ses cheveux et fit des nattes à ses cheveux blonds, mais Prune, au lieu de se sentir heureuse avait une grande tristesse dans le cœur. Ce n'était pas la séparation qui tirait les larmes de ses yeux, mais le pressentiment qu'un événement funeste se préparait.
Quand prune sortit de la forêt, c'était le jour de son vingtième anniversaire. Elle vécut alors sa vie de femme, et enfin très vieille elle raconta son histoire, alors que personne ne l'écoutait plus vraiment à part les enfants et que la forêt ne pouvait plus en souffrir.
Je me souviens parfaitement qu'au travers de son regard fixe et étonné lorsqu'elle cessait soudainement de parler, on distinguait quelque chose autre, d'étranger, de quasi sauvage. Je me figurais qu'elle comprenait dans le même temps qu'elle racontait le sens de ses propres paroles, ce qu'elle avait vécu de 7 à 20 ans dans la forêt et que sa mémoire faisait resurgir aujourd'hui. [...]