Le rêve d'un curieux
Les fleurs du mal (1861)
Charles BAUDELAIRE (1821-1867)

    À F-N- 
    
    Connais-tu, comme moi, la douleur savoureuse, 
    Et de toi fais-tu dire : " oh ! L'homme singulier ! " 
    - J'allais mourir. C'était dans mon âme amoureuse, 
    Désir mêlé d'horreur, un mal particulier ; 
    
    Angoisse et vif espoir, sans humeur factieuse. 
    Plus allait se vidant le fatal sablier, 
    Plus ma torture était âpre et délicieuse ; 
    Tout mon cœur s'arrachait au monde familier. 
    
    J'étais comme l'enfant avide du spectacle, 
    Haïssant le rideau comme on hait un obstacle... 
    Enfin la vérité froide se révéla : 
    
    J'étais mort sans surprise, et la terrible aurore 
    M'enveloppait. - eh quoi ! N'est-ce donc que cela ? 
    La toile était levée et j'attendais encore.



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Le rêve d'un curieux est un extrait du livre "Les fleurs du mal (1861)" - CLE

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