Pointe Noire
Recueil de poésies de Clarisse
GIBOULÉES DE PAPIER
C'était une nuit
C'était un soir
Un soir d'avril
Du papier froissé
Entre les doigts
D'une petite fée.
Du papier froissé
Qu'elle avait inventé
De toute pièce
Dans sa tête.
Un papier argenté
Et quelques incrustations dorées
En surimpression passée
Pour accrocher le regard
Des passants hagards.
Soudain une giboulée
Se met à tomber.
Elle noie tout
Le papier
Et la fée.
La fée fond
Sur le papier froissé
Prend la couleur
De l'acier trempé
Forme des éclats de plomb
Forme des éclats de sang
Des éclats ensanglantés
Qui se mêlent à l'or et l'argenté.
Un pêcheur passe alors
Et emporte dans son filet
Toutes ces couleurs mêlées
Sans se douter
Qu'au milieu du dégradé
Baigne une petite fée.
De ses mains il retire les couleurs
Les déposent dans un seau
Tout un seau de bonheur.
Arrivé chez lui
Il vide le seau
Dans un grand vase transparent
Pour admirer le mélange savant
Des matières des couleurs.
Soudain ses yeux s'écarquillent
Que se passe-t-il
Au fond du grand vase ?
Il croit apercevoir
La couleur sang se détacher
Des autres couleurs
Se transformer
Sous son regard
En un corps de femme
Le corps d'une femme le corps d'une fée
Qui sort du vase
Saisit de ses mains
Les couleurs argentées les couleurs dorées
S'en fait une robe de mariée
Y ajoute une longue traîne blanche
– C'est l'écume blanche
Qui s'est formée lorsque
Les 3 couleurs se sont mêlées –
La petite fée ainsi vêtue
Plante son regard dans celui du pêcheur
Qui la couvre de ses yeux
La couvre de ses bras grands ouverts
La couvre de printemps et d'été
La couvre de son cœur brûlant
D'éclats de neige et de soleil.
C'était une nuit
C'était un soir
Un soir d'avril
Du papier froissé
Entre les doigts
D'une petite fée.
Du papier froissé
Qu'elle avait inventé
De toute pièce
Dans sa tête.
Une petite fille
Qui n'avait fait que rêver.