Sonnet
Pontus de TYARD (1521-1605)

Père du doux repos, Sommeil père du songe,
Maintenant que la nuit, d’une grande ombre obscure,
Faict à cet air serain humide couverture,
Viens, Sommeil desiré, et dans mes yeux te plonge.

Ton absence, Sommeil, languissamment alonge,
Et me fait plus sentir la peine que j’endure.
Viens, Sommeil, l’assoupir et la rendre moins dure,
Viens abuser mon mal de quelque doux mensonge.

Ja le muet Silence un esquadron conduit
De fantosmes ballans dessous l’aveugle nuict,
Tu me dedaignes seul qui te suis tant devot !

Viens, Sommeil desiré, m’environner la teste,
Car d’un vœu non menteur un bouquet je t’appreste
De ta chère morelle, et de ton cher pavot.